En dépit de l’opposition de la majorité des professionnels du secteur, la réforme de la loi sur l’internement psychatrique sans consentemement légal est entrée en vigueur, lundi 1er août. Promulguée le 5 juillet, cette réforme, qui autorise notamment les soins sans consentement à domicile, est dénoncée comme un texte « sécuritaire » par l’opposition et l’ensemble des syndicats de psychiatres.
Dans plusieurs tribunes publiées dans Le Monde et sur Le Monde.fr, des professionnels avaient en effet expliqué leur mécontentement, exprimant leur « profonde inquiétude » quant aux dérives sécuritaires possibles. Des collectifs de psychiatres se sont d’ailleurs formés en opposition à cette loi, tel le « collectif des 39 contre la nuit sécuritaire », qui juge la loi « absurde, incohérente et inapplicable ».
Le texte, qui instaure deux changements majeurs, pose en outre un problème d’applicabilité. La première évolution prévoit l’élargissement de l’obligation de se soigner pour les malades qui ne peuvent y consentir librement. Après au maximum 72 heures d’observation, un patient peut se voir prescrire soit une hospitalisation complète, soit un « programme de soins », qui réside dans une hospitalisation partielle ou des soins à domicile.
« UNE LOI TRÈS COMPLIQUÉE À METTRE EN ŒUVRE »
La deuxième évolution a été ajoutée à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité et consiste en l’obligation d’instaurer une audience auprès d’un juge des libertés et de la détention (JLD), qui contrôlera le bien-fondé de l’internement. Cette décision, plutôt saluée par le secteur de la psychiatrie, pose néanmoins des difficultés. « C’est une loi très compliquée à mettre en œuvre, et l’échéance tombe alors que médecins, infirmiers, juges et greffiers sont en vacances », a ainsi résumé Joseph Halos, président de l’Association des établissements participant au service public en santé mentale (Adesm) auprès du Monde (lire l’article, accessible seulement pour les abonnés).
Pour des raisons pratiques, il est notamment possible que les audiences devant le JLD se déroulent en visioconférence, une option très fortement critiquée, entre autres par le collectif « Mais c’est un homme » qui souhaite purement et simplement l’abrogation de cette loi.
« UN PLAN D’ACTION ET DE RÉSISTANCE ÉTHIQUE »
Ce collectif, composé notamment de plusieurs partis politiques d’opposition (Europe Ecologie-Les Verts, le Parti de Gauche, le Parti communiste français) ainsi que du Syndicat de la magistrature, a publié ce lundi un communiqué dans lequel il se déclare désormais « en résistance ». « Le mouvement fort de lutte contre cette loi peut et doit se poursuivre après sa promulgation », écrivent les signataires, estimant que la loi est « fondamentalement inacceptable car elle impose la contrainte et le contrôle social comme organisation du soin en psychiatrie, de l’hôpital au domicile, sous la nouvelle appellation aberrante de soins sans consentement ».
Le collectif se dit « favorable à un débat national » sur le sujet et, en attendant, propose « un plan d’action et de résistance éthique » consistant principalement à désobéir à certains points de la nouvelle loi, tel que la mise en place des mesures de contraintes et suggère le « soutien des patients soumis à ces ‘soins sans consentement' ». Les signataires proposent à cet effet la création d’un « collectif d’avocats et juristes ». « L’application servile de la loi ne créerait pas seulement l’injustice ou l’aberration psychiatrique ; elle créerait l’illégalité », estime encore le collectif, justifiant son appel à la « désobéissance civile ».
Le Monde.fr